Vous connaissiez Les fleurs du mal ? Je vous présente Les Fleurs de l’âge, le premier livre de la chroniqueuse et journaliste Josiane Asmane qui dynamite les idées reçues sur les femmes "d’un certain âge". Celles que célèbre l’auteure au fil des pages se moquent d’avoir 50, 60, 70 ans… ou 101 ans. Leur credo ? Faire fi des attentes et schémas associés à leur classe d’âge. Surtout, vivre leur vie au mieux et se réinventer, en faisant des années leurs alliées.
Point d’apitoiement ici. Oubliez les doux sentiments de compassion voire de mépris pouvant émerger quand vous croisez celle que vous identifiez comme une "petite dame", une "adorable" grand-mère, une "mémé" ridée et autres figures un poil caricaturales de femmes âgées. Dans Les Fleurs de l’âge (éditions Flammarion), on rêve, on s’étonne, on admire, on s’inspire au fur et à mesure qu’on parcourt cette galerie de portraits consacrée aux "perennials".
Au pays des perennials
Signifiant littéralement "plantes vivaces" en anglais, ce terme inventé en 2016 par l’entrepreneuse Gina Pell désigne "un état d’esprit curieux et florissant partagé par des personnes de tous âges qui résistent à la catégorisation et à la définition par génération"*. Au pays des "perennials", finis les découpages par tranches d’âge. Adieux boomers, X, Y, Z. Ici, les qualités des individus priment sur leur appartenance générationnelle.
Car comme l’explique la journaliste Annie Kahn, "quel que soit son âge, on peut être curieux de tout, rester au fait des dernières évolutions technologiques, avoir des amis de son âge mais aussi beaucoup plus jeunes et ou beaucoup plus vieux. (…) En bref, se renouveler sans perdre ses qualités"**. En témoigne Colette, qui après avoir travaillé dans la publicité puis la chimie, été traductrice puis attachée de presse, concrétise à la retraite son rêve d’adolescence : écrire. Du haut de ses 92 ans, elle nous souffle : "il faut créer l’occasion. Il faut que les choses arrivent, sans quoi la vie est ennuyeuse, à n’importe quel âge".
Le parcours de Natacha, une autre des femmes mises à l’honneur par l’auteure, s’inscrit dans la même logique : après s’être vue écartée de son travail passé 50 ans, elle se lance dans l’entrepreneuriat en créant un blog pour accompagner les femmes de 45 ans et plus à passer le cap de la cinquantaine et de la ménopause. Ou comment transformer une crise en opportunité et faire bénéficier à d’autres des fruits de son expérience.
La puissance invaincue des vieilles
A 58 ans, Patricia quant à elle cumule les casquettes : à la fois DJ, conférencière en prison, styliste, coach… celle que Josiane Asmane décrit comme une iconoclaste confie que sa "puissance en tant que femme est montée avec l’âge". De quoi donner tort à l’idée selon laquelle vieillir serait synonyme de déclin. Il y a aussi Dominique, Jackie, Claudia, Perla, Arlette, Marie-France, Sophie…
Au fil des pages, leurs témoignages dessinent un portrait inversé de la vieillesse : une vieillesse tour à tour créatrice, piquante, heureuse, puissante, jouissive, optimiste… Et surtout, libérée des injonctions âgistes et sexistes (i.e., "sois belle, jeune et tais-toi").
Si le livre prend le parti de mettre en avant des femmes inspirantes, aux personnalités fortes, une question se pose : comment rendre cet idéal d’une vieillesse libérée et épanouie accessible au plus grand nombre, en particulier à celles qui souffrent de vieillir ? Comment multiplier les Perla, les Natacha, les Colette et les Patricia, pour ne citer qu’elles ?
Sans doute, créer des nouveaux rôles modèles fait partie de la solution, comme le souligne Josiane Asmane dans son livre. Le combat porte aussi sur les conditions psychologiques et socio-économiques rendant possible cet idéal, quels que soient le genre, l’origine ethnique, la classe sociale, l’orientation sexuelle, les capacités, entre autres, de chacun.e.
En attendant, pour contribuer à réinventer la vieillesse, vous pouvez lire Les Fleurs de l’âge, l’offrir ou en parler autour de vous. Et si le cœur vous en dit, vous rendre à l’exposition du même nom qui rouvrira ses portes en septembre à la galerie L’Oeil Bleu à Paris (cf. détails ci-dessous). Elle accueillera des femmes au parcours inspirant lors de soirées et ateliers gratuits, ouverts à tou.te.s. Effet stimulant garanti ! Car ce que révèlent au passage le livre et l’exposition qui l’accompagne, c’est que vieillir peut être non seulement une opportunité pour renaître à soi, mais aussi une incroyable école de vie !
Vous avez lu le livre ? Vu l'exposition ? Le sujet vous parle ? Vos commentaires et témoignages sont hautement bienvenus, quel que soit votre âge :)
Pour aller plus loin :
L’exposition "Les Fleurs de l’âge" à la Galerie L’Oeil Bleu, 32 rue Notre Dame de Nazareth 75003 Paris (réouverture en septembre 2021).
"Une trentenaire documente les femmes dans 'les fleurs de l’âge'", J’ai piscine avec Simone.
Le "lexique pour 'disrupter' les représentations de l'âge", J'ai piscine avec Simone.
Le blog de Natacha Dzikowski : https://natachadzikowski.com.
* Source : Center for reproductive rights.
** "Plutôt que de célébrer les millennials, mieux vaut déceler les perennials", publié le 23 juin 2018, Le Monde.
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